Mon automne n’est jamais monotone

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Mon Automne s’éclate de soleil, j’aime l’Eté indien chez moi, entre bleu et rouille, les couleurs oscillent entre les deux , le bleu d’un Eté qui s’incruste et n’a pas tant envie que ça de s’en aller, le rouille orangé d’une saison qui flamboie. Les derniers marchés de producteurs avant l’hibernation, les touristes sont rentrés « enfin » chez eux, on prend le temps de se parler, de discuter, de se comprendre, on se dit qu’il est temps de préparer Halloween, parce que les petites sorcières vont prendre leur envol.  Dans quelques jours on installera les décorations.  On se dit qu’on aime notre région plus que tout au monde. Si j’allais broder un peu, au lieu de baguenauder sur les petits riens.

Huilerie et savonnerie à vapeur, Garcin et fils.

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J’attendais que ma fille ait terminé sa compétition de tir, sur le parking en face du stand. Juste à côté un château magnifique, transformé en école maternelle.  je le regardais. Je  me suis garée sous d’énorme platanes. J’ai pris des photos. Les bâtiments fermés et magnifiques essayaient de me raconter leur histoire, la voie ferrée à proximité. J’avais beau chercher dans mes souvenirs, j’avais pourtant habité Salon de Provence et rien de me revenait en mémoire, sauf les magnifiques demeures, bastides et châteaux qui jalonnent encore cette ville que j’avais aimée l’année de mes 15 ans, mais à 15 ans, on pense juste à aller voir « Grease » au cinéma.  J’ai continué mes photos.

Ce soir en rentrant à la maison, j’ai fait des recherches, j’étais garée dans la savonnerie Garcin. Les Savonneries, l’âge d’or de Salon de Provence, la richesse d’une Provence qui donnait du travail à tous.

L’époque bénie, c’était en 1900, juste avant le tremblement de terre qui dévasta la Provence. C’était hier, enfin presque hier, les pierres me le rappellent, et j’ai souri en regardant la gravure de la facture trouvée sur un site de vente aux enchères, j’étais garée là, à l’endroit où je vois un jeune platane, un jeune platane aujourd’hui centenaire et majestueux, et j’ai reconnu le fer forgé de la grille de la « villa beau-soleil » de Monsieur Garcin qui devint maire de la ville, si je ne me trompe pas. Si les arbres pouvaient tout nous raconter. Vivement la prochaine compétition ou le prochain stage, que je fasse encore plus de photos, et que je sois attentive à ce que veulent me raconter les pierres.

Pour en savoir plus : L’âge d’or des Savonniers de Salon de Provence et Savonnerie Rampal Latour

 

Synesthésie hebdomadaire

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Avant de t’enfermer dans ton bureau, tu flânes et comme tu n’en as pas assez tu y retournes à midi pour évacuer l’idiotie d’un monde que tu ne comprends pas. Tu en prends plein la tête c’est le festival des 5 sens,  les couleurs plein les yeux, les senteurs plein les narines, les rires et les bruits plein les oreilles, tu touches et tu retouches, et tu ne peux t’empêcher de goûter. Tu regardes et tu humes, tu écoutes les couleurs, tu es en crise de synesthésie sans t’en rendre compte.  Chaque odeur se teinte, chaque couleur triomphe en une symphonie parfaite que tu es le seul à entendre, tu musicalises les parfums, tu personnalises les lettres, les chiffres et les objets,  tu es synesthète, tu l’as toujours été et tu pensais que tout le monde ressentait cela.

 

Le marché, c’est ce moment de folie où tous tes sens s’affolent te permettant de créer en une immense farandole des imaginaires contrées et des souvenirs d’antan,  les végétaux et les tapis te ramènent à l’Orient, tu veux plonger tes mains dans le mohair, les fourrures s’illuminent d’arc en ciel, tout devient kitch et flamboyant,  en un instant, tu remets tes deux pieds sur terre.

Ton cerveau se calme enfin, tu réalises que plus rien ne te touche, rien ne t’émeut, les réflexions t’effleurent à peine, tu trouves le monde entier puéril et insignifiant,  elle est morte hier, il y a un an, elle était elle aussi synesthète, avec des neurones un peu étranges qui décident seuls de mélanger tous les sens.

 

 

L’atelier du Jeudi

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On a repris l’atelier depuis bientôt un mois, c’est bon de se retrouver avec une année sabbatique, comme si nous nous étions jamais quittées, douceur, rires et fous-rires toujours au rendez vous, des projets pleins la tête et puis ce petit quelque chose qui nous dit que nous sommes bien entre nous. Nous sommes si peu nombreuses, qu’il ne risque pas d’avoir des clans comme dans d’autres clubs, c’est insupportable les clans, mais ce qui est le plus insupportable c’est la surenchère d’achats et la boulimie de travaux, nous nous travaillons à notre rythme, nous faisons ce que nous avons envie, avec ce que nous avons en stock, surtout sans contrainte ni limite, on s’éclate et c’est bien l’essentiel. Chez nous il n’y a pas la place à la médisance, à l’ego, à la vanité et à l’orgueil mal placé, c’est ce qui fait notre force. On est comme on est, on partage tout, on s’aide, on s’entraide, finalement je crois qu’on s’aime et on soigne nos blessures à grands coups de sourires et de compassion, cette compassion qui fait défaut à tant de gens. Vivement jeudi prochain, pour que l’on créé de nos mains nos songes, nos rêves. Bonne soirée à vous, je vais avancer mon petit ouvrage.

 

PS / C’est sympa les photos avec un téléphone, mais il va falloir vraiment que je reprenne mon appareil photo …

Pause méridienne

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J’aime cette expression la pause méridienne, cette barre qui sépare la journée en deux,

comme le méridien de Greenwich qui sert de référence à la longitude mais pourquoi est ce midi, la pause méridienne et non pas minuit ?

Je divague, je sais, j’oublie mes repères d’une matinée que l’on voudrait oublier, j’aime oublier ce que je fais, ça me permet de refaire inlassablement sans jamais m’ennuyer.   J’aime cet instant de calme et de sérénité où entre deux moments de labeur, on s’arrête pour déjeuner, discuter, pique niquer ou tout simplement buller.

J’attends mon hôte, je suis arrivée avant elle, elle a choisi cet endroit parce qu’il est familial,  mon regard se pose ici est là, tout d’abord les teintes douces et chaleureuses où même le noir s’éclate dans un automne pas tout à fait ancré, je m’installe, et mon regard se repose ici et encore là, le carrelage ancien de ciment teint, une baladeuse qui devient objet d’art, des meubles doucement décapés, des objets du passé qui s’intègrent comme s’ils avaient passé leur vie d’objet à cet endroit même. Une vie d’objet, c’est inspirant une vie d’objet, j’aime imaginer que les objets se souviennent des personnes qui les ont fabriqués, utilisés, aimés, achetés, leur créateur, leur propriétaire laissant une empreinte indélébile en leur creux. Façonnés main ou usinés, ils sont l’oeuvre d’un humain qui a laissé un je ne sais quoi que je ressens. N’avez vous jamais ressenti cela dans une brocante ou un vide grenier, irrésistiblement attiré par un petit rien de quatre sous ? Cela m’arrive à chaque fois à chaque instant pour peu que l’objet soit un tantinet ancien, et c’est ainsi que je m’attendris sur une vase, imaginant qui a bien pu déposer des fleurs dedans, un vieux cadre, une aquarelle anonyme, une tasse à café qui me raconte les après déjeuner en famille. Et voyant les bouteilles anciennes,  je me vois courir à l’épicerie des Goudes pour ramener quelques bouteilles de Pschitt consignées et m’acheter deux Malabars à dix centimes,  j’ai 5 ans.

 

« Objets inanimés, avez vous donc une âme ? »

Le déjeuner était parfait, auréolé de Provence, chaque odeur qui émanait de la cuisine, me racontait elle aussi, les gestes ancestraux d’un chef qui aime ce qu’il fait. Vivement la prochaine pause.

 

Le troquet

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C’est tôt, c’est l’heure du premier café avant d’aller travailler, en ce moment j’ai presque 3/4 d’heure d’avance, je laisse ma fille au collège et je file sur la grande ville, ainsi je prends le temps de m’attarder au café. Il pleut, l’odeur du bitume mouillé me ramène plus de 20 ans en arrière. Rue Saint Do, Paris, le café en face mon bureau, la halte des grands messieurs de l’Assemblée Nationale, ça chuchote au comptoir dans des costumes qui valent 10 mois de mon salaire, le pli des pantalons tombent sur leurs Church en un drapé parfait de prince de Galles ou de flanelle, les cravates parfaitement ajustées,  les chemises Oxford, ça sent l’eau de parfum de luxe et le tabac blond,  les journaux ne sont pas la Provence, mais le Parisien,  le Monde, le Figaro, Libé ou le Canard. D’être dans ce café si tôt me ramène des années en arrière, ici aussi c’est feutré, encore plus qu’à Paris, c’est doux et calme, les chaussures ne sont pas des Church à 800 euros la paire, 800 euros ici c’est un salaire mensuel ou même moins quelquefois. Quelqu’un demande à baisser le son de BFM, encore ensommeillé, il lit le journal et se navre des inondations de l’Aude. On termine un peu nos nuits sur les canapés et fauteuils club en buvant nos cafés. Le patron est gentil et souriant comme d’habitude, je croise un monsieur que j’accompagne, il me fait un grand geste  pour me saluer et je suis heureuse. Je me demande pourquoi une de mes vies antérieures a refait surface ainsi, je ne sais  vraiment pas pourquoi, le temps, la pénombre, l’odeur du café, la ville qui s’éveille  … une heure après … un nouveau gouvernement est annoncé, ça doit piailler bien fort dans le café de l’Assemblée …

Le Château des Aigles

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Au détour d’un rond point, on tombe sur cette étrange construction, qui n’est ni vieille, ni jeune, juste un délire du propriétaire qui parait-il construit envers et contre tous, des extensions quand il en a envie. Après y être passée trois fois devant, je m’y suis arrêtée, je ne pouvais m’en empêcher. J’ai demandé aux passants : De quand date cette maison ? On m’a répondu : Ce n’est pas si vieux. Qui l’a construit ? Le mari de la propriétaire … j’ai même en cherchant sur internet trouvé des appartements à louer. Je suis tombée en amour pour cette maison totalement atypique, improbable en cet endroit, et certainement intemporelle, imaginée par un Facteur Cheval de notre temps. Pour moi c’est de l’art, même si certain on tendance à mépriser les Aigles qui toisent les passants. Comment pourrait-on ne pas être ému, par cette construction hors norme qui doit faire se hérisser d’angoisse n’importe quel architecte conseil. J’y vois, le travail d’une vie effectué par un bâtisseur hors du commun, un rêveur, un maçon un peu fou,  un homme libre, un homme qui plantait des orangers.

Il y a des gens qui au milieu de la tourmente poursuivent leurs rêves.

 

Vent d’Est

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Marin un jour, marin pour toujours, il suffit de peu pour que mon âme redevienne bleue, ou grise ou verte selon les humeurs des flots. J’ai glané sur la plage des trésors infimes,  mon esprit s’envole, mes rêves s’entrechoquent, je rêve d’histoires d’amours, de capitaine aux longs cours, de départs, de retours, d’îles lointaines ou si proches, du goût du sel sur mes lèvres, je rêve en marchant dans la tempête, une téméraire se baigne, des enfants courent ou se balancent en regardant l’horizon, j’évite les vagues et respire les embruns, j’y suis heureuse. Dans mes jeux imaginaires,  je tresse des colliers de posidonie, je crée des parures de coquillages pour des reines aux pieds nus, je tricote des pelotes d’algues,  j’invente le destin funeste des bois flottés, usés et taraudés par les  remous. Fait il froid ? Je ne sais pas, le vent d’Est souffle en un tourbillon incessant, le début d’un cyclone ou la queue d’une tornade, on ne sait plus très bien, d’énormes esquifs mouillent au large, il ne prendront pas la mer, pour l’Orient, pour là bas où le pétrole coule à flot, pour le pays des mille songes. Mille étoiles brillent dans le sable, perles de quartz et de micas, oraison funèbre pour les poissons et coquilles mourants,  J’entre dans le café qui domine la grève, le maître des vents nous y accueille, il souffle doucement sur ces doigts, on s’y restaure, on s’y réchauffe, mais je m’enfuis laissant à table les frileux, je retourne à la grève, irrépréhensible besoin d’y courir, je suis la coureuse des grèves, je suis libre, je suis la glaneuse de rivages, je cultive les algues, je prends soin des poissons, j’affronte la houle, car  je suis avant d’être un marin, jardinière de la mer. Amiral, la mer me manque, mais vous le saviez déjà.

Et puis ce bruit des vagues qui couvrent tous les bruits sans que nous en soyons conscients, il éteint tous les sons, comme il peut effacer tous chagrins d’une vie.

L’entendez vous.

 

J’aime la musique des vagues,  la partition du vent, qui jouant dans les filins des bateaux compose une symphonie irréelle, j’aime le chant des mats.

 

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Vent d’Est

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