Frédéric est un copain d’enfance, un passionné de culture provençale et de costumes provencaux, au point qu’il a exposé lors des dernières Aigu’illes en Luberon, de merveilleuses bastidanes, dont j’ai encore du mal à me remettre.
L’année dernière pour la chandeleur, il m’avait offert ce texte sublime, un texte qui parle de nos coutumes, chez nous, un peu en dessous d’Avignon Nord ;-) pour le bulletin municipal de mon village. Aujourd’hui j’avais envie de le faire partager à bien plus de personnes qu’un village car je ne me lasse pas de le lire.
La Chandeleur
Le cycle de Noël, en Provence, commencé dès le 4 décembre avec le blé de Sainte Barbe, poursuivi dans la nuit du Solstice avec le feu de la Bûche rallumé en pleine nuit, après les Rois, s’achève avec le délicieux moment de la Chandeleur. Le 2 février, en effet, c’est la Chandeleur.
Ce jour-là, je ne vous apprendrai rien, c’est le jour où l’on fait des crêpes. Une fois la pâte préparée et reposée, en signe de bon présage et de richesse, chacun doit faire sauter les crêpes en ayant pris soin de serrer dans sa main un Louis d’or (si vous en possédez encore à la maison, mais un Napoléon fait très bien l’affaire, et à défaut, un élément en or bien que l’on s’éloigne de la rondeur de l’objet !) Pourquoi une crêpe d’ailleurs ? Pourquoi pas un gâteau long, carré ou pointu ? La crêpe nous rappelle la rondeur du soleil, le cycle qui s’achève et se reproduit sans cesse, car le cycle de Noël s’achève en ce jour. Et puis, elle nous rappelle aussi que l’on n’a jamais fait de sartan* carrée, mais passons…
Jusque là rien de bien nouveau ! Mais que se passe-t-il d’autre à la Chandeleur ?
Il est d’usage ancien ce jour-là, si vous avez respecté la tradition, de recouvrir la crèche d’un linge blanc, de rajouter si on les a, le Grand Prête du Temple, Siméon, La vieille prophétesse Anne et de poser un couple de colombes, car on respecte ainsi ce jour-là la tradition juive de la Purification de Marie, et dans la liturgie catholique la Présentation de Jésus au Temple. C’est ce que nous appelons la Crèche Blanche. Inutile de peindre vos santibèlli en blanc, le voile suffira. Pour les puristes, quelques rares santonniers vous proposent la crèche blanche. Au Soir, tout sera démonté et rangé. Dans une boite en carton vont se rendormir les petits santons….
Et alors, puis ?
Pour beaucoup de Marseillais et de Provençaux, nous fêtons Nouosto Damo dóu Fue Nòu (Nostre Dame du feu Nouveau, et pas du fenouil !… Parce que Candelouso en provençal, vient de Candèlo, la bougie, ce jour, il faut aller s’approvisionner en cierge vert à l’abbaye de Saint Victor et y acheter les fameuses navettes (on en trouve aussi à l’épicerie !) L’abbaye de saint Victor bénéficie depuis le Roi René d’un droit de sceller les documents en vert, et les navettes rappellent la petite barque qui a amené les expulsés de Palestine venus évangéliser notre Provence… Disons aussi et surtout que navette et cierge sont aussi des représentations d’un souhait très fort : que le feu nouveau reprenne et que la vie rejaillisse à nouveau… A y regarder de plus près, une navette, ma foi, est une forme fendue… un cierge vert est plein d’ardeur… Vous y mettrez les représentations que vous souhaitez.. Oui, oui c’est ça ! N’en dise pas mai !
Allez, mangez des crêpes et des navettes gardez votre paille, car pour Carnaval il faudra brûler toute la mauvaise saison et faire les auriheto ! Adessias ! On n’a pas fini de faire la fête, et comme disait ma grand-tante Marie à un touriste qui regardait le programme de la fête : « an de que passa soun tèms ! »
*Sartan : poële en provençal, mais aussi méchante personne ….
Maintenant vous savez que pour la Chandeleur il faut manger des navettes (en plus des crêpes)… et faire soi même ses navettes ….
La recette de Frédéric et ses navettes … bien plus jolies que les miennes …
2 oeufs, 200 gr de sucre à blanchir ensemble, puis 1 verre de fleur d’oranger, 3 cuil à soupe d’huile d’olive, 500 gr de farine, à pétrir 10 mn . 2 heures au frais puis couper en bandes et former des rouleaux. cuisson 20 minutes puis décoller puis 5 minutes encore de cuisson.
Et la recette à moi ….
Ingrédients Navettes de saint-Victor
– 500 g de farine
– 250 g de sucre semoule
– 50 g de beurre
– 3 œufs
– 1 cuillerée d’huile
– Un peu de sel
– Eau de fleur d’oranger
Préparation Navettes de saint-Victor
Mêlez dans une grande jatte la farine, une grosse pincée de sel et le sucre. Creusez en fontaine et mettez-y 2 œufs entiers, un peu d’eau de fleur d’oranger et le beurre préalablement ramolli à la fourchette. Travaillez bien le mélange en ajoutant juste ce qu’il faut d’eau pour obtenir une pâte un peu ferme. Rassemblez en boule et laissez reposer au frais une heure au moins. Formez 4 ou 5 boudins de pâte d’un diamètre de 2 ou 3 centimètres ; coupez en morceaux de 7 ou 8 centimètres de long dont vous façonnerez les extrémités en forme de pointe de barque. Posez-les au fur et à mesure sur une tôle huilée (ou garnie d’une feuille de papier silicone), tracez une fente profonde sur chaque navette avec la pointe d’un couteau. Laissez reposer une heure. Passez à l’œuf battu.
Faites chauffer le four réglé sur therm. 5 (180 °C) et cuire une vingtaine de minutes.
Laissez refroidir.
C’est le plus difficile à faire, laissez refroidir …. la prochaine fournée, elles seront plus jolies.
Et traditionnellement le mardi je vais au marché de la Tour d’Aigues … le soleil avait du mal à percer la brume, et pourtant les couleurs m’ont enchanté comme à chaque fois …
et devinez j’ai rencontré plein de monde et nous avons parlé de quoi ? Devinez ?
d’Aigu’illes en Luberon bien sûr, alors il parait que nous avons rendez vous en 2017