Et la dentelle sauva l’Irlande
William Adolphe Bouguereau, la petite fille au crochet – 1905
La dentelle d’Irlande se joue du contraste entre les motifs en relief et épais et le filet fin sur lesquels ils sont crochetés.
Inspirée des dentelles italiennes et espagnoles à l’aiguille de la fin du XVII ème siècle, la dentelle d’Irlande se devait de faire concurrence (dans les années 1840) aux précieuses et coûteuses dentelles aux fuseaux.
Les motifs évoluèrent, et la pure imitation devint un art à part entière, reflétant une culture irlandaise, on retrouvera les roses et les trèfles, la rose à cinq pétales symbolisant les cinq plaies du Christ, le trèfle de Saint Patrick servant à illustrer le mystère de la Trinité.
Mademoiselle Riego de la Branchardière revendiqua l’honneur d’avoir personnellement inventé cette technique. Elle était née en Angleterre d’une mère irlandaise et d’un père français, famille émigrée en Angleterre depuis 1789. Elle publia entre 1848 et 1887, plus d’une centaine de brochures destinée aux travaux d’aiguille. Mademoiselle Riégo de la Branchardière avait surtout une immense connaissance des techniques anciennes, et s’était beaucoup inspiré des travaux anciens et ceux d’autres dames bien moins érudites qu’elle, et elle avait ce que beaucoup lui enviaient, l’intuition de savoir ce qui serait dans l’air du temps
Pendant la grande famine (1845-1850) – je ne vais pas vous refaire l’histoire de l’Irlande, quand même ….- . La dentelle au crochet sauva l’Irlande, et la vie de nombreuses personnes. Elle permis à grand nombre d’entre eux de pouvoir émigrer, et de nourrir leur famille.
Les religieuses lancèrent une immense opération, aidées par les dames de classes aisées. Elles enseignèrent le crochet aux familles les plus démunies (hommes, femmes,enfants …) et trouvèrent des commanditaires, fournissant le coton et les crochets, et écoulant les ouvrages. Outres les religieuses, les dames de la bonne société s’organisèrent, remplissant granges et maisons bourgeoises d’élèves apprenant le crochet, parmi elles, Suzanne Meredith fondatrice à Cork de l’école « Adélaïde« , ou Madame Hands développant ainsi dans le Nord de l’Irlandeune importante industrie.
Bon marché, facilement lavable, le crochet et le coton envahirent toutes les maisons, même les pires masures, les travaux étaient de toutes beautés. Les gens crochetaient devant leur maison assis sur un talus ou un muret. Les personnes se spécialisaient dans un motif et donnaient les autres motifs à crocheter à d’autres.
Le succès fut immense, de 1880 jusqu’en 1910, la dentelle d’Irlande fut exportée partout dans le monde, le grand couturier parisien Paquin utilisa la dentelle d’Irlande dans ses modèles, l’Art Nouveau s’y prêtant fortement à la luxuriance des motifs.
La production gagna l’Autriche, l’Allemagne, l’Est de la France, et même l’Italie d’où elle s’était inspirée.
Le déclin eut lieu dans les années 20, la concurrence de la dentelle mécanique, l’essor des métiers industriels devint trop forte.
Sources :
Fait main 1989
Irish Lace Museum
Collection de textile ancien ICI et ICI, à voir absolument, des merveilles.
Ceci est un article que j’ai écris en novembre 2008, sur le blog communautaire « histoires de boites à couture ».
Les photos sont issues du Metropolitan Museum of Art
8 commentaires
Nadine
Tu as bien fait de ressortir cet article, la dentelle d’Irlande est très belle, la technique assez simple, j’adore
fabienne
Et bien voilà! j’ai appris quelque chose aujourd’hui.. Merci!
Hubert
Impressionnant !
jbrod
Un morceau de dentelle pour sortir de la pauvreté, vive le crochet!
Merci pour cet article captivant.
Piroshka
Un bon rappel ,merci !
Amitiés
Edith
la fée faribole
Merci pour ce bel article et cette balade irlandaise au pays de la dentelle , c’est si beau …
Amitiés
Sandrine
cova
Merci pour cet historique, je connais assez bien la dentelle d’Irlande, mais je ne savais pas tout cela.
Voici un lien vers l’œuvre de Marielle OLIVIER, M.O.F. ;
http://guipureentrelacs.canalblog.com/archives/2011/05/14/21132890.html
Adèle
Qu’est-ce que c’est beau ! Arachnéen est le qualificatif qui me vient, même si je n’aime pas les araignées. Tout en délicatesse et en finesse.