Un lundi dans le monde

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C’est lundi, hélas je ne vous l’apprends pas. Je me suis levée très tôt pour souhaiter une bonne semaine à ma fille qui repartait dans sa chambre universitaire, j’ai vaqué aux occupations bassement matérielles. Avant de lâcher les chevaux et les poules, je suis allée au café du village prendre une boite de tabac, les yucca en face la terrasse étaient tous en fleurs, il faut que j’y retourne avec mon appareil photo, c’était superbe, mais encore dans la pénombre.  Dans le café, un copain d’enfance, un copain viticulteur, savourait les vendanges terminées devant son café. Où sont nos 14 ans à tous les deux, nos virées à moto, à cheval, nos soirées à écouter les anciens nous raconter « la dome blonche » du Luberon, de ces soirées où l’on mourait de trouille, où est passé notre adolescence, les cassettes de Goldman et les chansons à tue tête dans les voitures ?  Un petit bonheur de le rencontrer, et de l’entendre dire en regardant ma canne « où étais tu passée; on était inquiet, c’est donc ça ?  » On se côtoie peu, nos vies nous ont éloignées, mais personne ne peut nous enlever cette histoire commune qui est la nôtre. une histoire de presque 50 ans.  Il a vieilli, j’ai vieilli, mais dans nos regards scintillent toujours l’étincelle que nous avions gamins, dès que nous faisions une bêtise, je ne le vois pas vieux, il est ce qu’il a toujours été, mon copain de toujours.

En rentrant le soleil se levait, blaffard, triste, un lever de soleil qui peine, qui a de la peine, comme s’il voulait nous dire, ce matin, je n’ai pas envie, oui tu auras du ciel bleu, oui tu te promèneras en tee shirt, mais regarde donc le monde ce que tu en as fait. J’ai eu des nouvelles par ma mère qui a appelé ses amies, Dina a Tel Aviv, va bien, ses enfants vont bien, malgré la mobilisation. Et cette guerre éternelle qui fait rage, si près à vol d’oiseau de chez nous semble ne concerner personne sur notre continent.

J’ai pris mon café dans le jardin, j’ai toujours pris mon café dehors, peut être parce que je fumais. Un reste de Banana Bread a complété mon petit déjeuner. Au loin, les chiens courant aboient, attendant le lever du jour, quelques coups de feu résonnent, la chasse, il n’y a plus rien à chasser, à part les sangliers qui pulullent, ils viennent quelquefois, les étés très chauds, boire dans les jardins.

J’avais pris un livre qui était à ranger dans la bibliothèque et qui se laissait aller sur la table du salon,  j’ai commencé à le feuilleter, déjà en 1988, Jean Marie Pelt s’inquiétait du réchauffement de la planète, les scientifiques la prévoyait pour 2100, on a quelques décennies d’avance. J’ai décidé de lire ou relire Jean Marie Pelt, cet immense botaniste, et grand écologiste que beaucoup ont oublié.

J’ai pris mon café, j’ai allumé une cigarette, après tout le tabac c’est une plante. J’ai regardé mon assiette, il y a si longtemps que je n’ai pas croisé de chevreuil sur ma route, c’est vrai je ne roule plus.

Bon lundi mon monde, bonne semaine, surtout à mes filles, qui ont la tête farcie de belles choses.

 

 

 

 

7 Responses

  1. F@bienne

    Cet homme a bercé mes trajets quand j’étais institutrice à la campagne, à 50 bornes de Clermont-Ferrand !! Un éminent et lumineux gentil qui expliquait si bien le vie des plantes … On a encore les podcast sur France Inter … allez, je vais me faire un café après mon temps de lecture du matin, et de pleurs sur le sort d’israel, de l’Arménie, et de l’Ukraine, et de tant d’autres…

    • La Bastidane

      Tiens je vais écouter les podcasts, ca me fera du bien. J’essaye de ne pas chouiner sur le monde, j’essaye de faire abstraction, Ukraine, Arménie, Israël, le Niger, le Haut Karabakh, ce pays là, il a fallut que je travaille en 92 dans les relations internationales pour savoir qu’il existait. Alors oui prenons un café si tu le veux bien.

  2. mamillon du Luberon

    nous ne sommes pas insensibles aux beautés de la nature, heureusement qu’elle est toujours là bien silencieuse et supportant toutes les mauvaises actions des humains.mais hélas nos journées sont trop souvent tristes, pourquoi les hommes continuent à tout saboter, détruire, les villes, le bonheur des autres, les innocents qui ne pensaient qu’à aimer et profiter de la vie ???? l’Ukraine, l’Arménie, la Birmanie, et maintenant Israël, et bien d’autres en Afrique, et nous restons sans pouvoir aider tous ces peuples , qui se battent pour une idéologie ou d’autres raisons,avoir le pouvoir, nous restons impuissants et ça nous met dans une rage folle.. Il nous faut pourtant continuer notre quotidien en essayant de regarder ailleurs, tant pis, c’est un peu une façon de nous protéger et de protéger nos proches.. bonne semaine à tout le monde, courage !!!

  3. Brigitte Julia

    Beau texte, beau et émouvant … Le temps passe si vite … Prend soin de toi et des tiens Nathalie.

  4. Nadine G

    Oups, il y avait bien longtemps que j’étais passée par chez toi, j’aime tellement lire tes nouvelles « brodesques », celles de tes animaux particulièrement des chats et grenouilles en passant par les poissons rouges. Hormis les nouvelles d’un monde en feu et folie, des nouvelles de ton jardin que j’adore, donc merci pour le long et bon moment passé à te lire depuis Septembre dernier. Promis je repasserais régulièrement, en attendant je vais poser quelques croix sur une toile de lin, chercher l’idée de broder une étiquette « PAUSE » pour l’atelier 196 …… merci et à bientôt.

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