Si j’avais été princesse de Kurlande, j’aurai fait tirer des coups de canon, les lilas commencent à fleurir, pas assez encore pour faire des bouquets mais ça ne saurait tarder, les iris aussi s’en donnent à coeur joie. Et le tamaris explosent, la campagne se colore. Le confinement va durer, encore un mois ou plus même. Je viens de m’apercevoir que rien ne change à ma vie, si ce n’est quand je vais faire des courses, un fois tous les treize jours au lieu d’une fois tous les dix jours, rien ne change vraiment, si ce n’est ma lycéenne qui suit ses cours sur son ordi, dans mon atelier, dans sa chambre ou sous la treille, elle a l’habitude, nous avions fait l’école à la maison durant trois ans, quand nous étions à Abu Dhabi. La grande est en vacances jusqu’aux partiels. Chaque chose en son temps. Si je regarde les petits riens des années précédentes, les mois passent mais les photos sont les mêmes, immuables et c’est ma vie. Cette année sera une année à monnaie du pape. On a joué, comme d’habitude avec les coccinelles, les chats, les chiens et autres animaux, on a surveillé les abeilles, on a jardiné, pour faire un joli coin pour l’été, parce que l’été viendra quand même, rien ne l’arrêtera. Le soir tombé, la cabane s’est parée d’une jolie lumière mauve dans le couchant. Mes mains n’ont rien de celles d’une brodeuse élégante, celle de Pauline non plus, et poutant elle brode, mais ce matin, c’est moi qui ai envie de broder. Alors je file dans l’atelier, à moins que je ne me mette au soleil, je n’ai plus envie de discuter avec quiconque, je suis bien dans mon confinement. Prenez soin de vous, ne vous hâtez pas trop.