Elles se sont toutes mises à tricoter, c’est à cause du mauvais temps …. toutes ? Non ! Quelques irréductibles …. une oeuvre d’art en cours de naissance, et d’autres merveilles à suivre ….
et bien entendu, le moment des petits plaisirs ….
Cher lecteur, ce matin, j’aurais pu t’envoyer une carte postale d’Avignon, mais je n’ai pas eu le temps, d’ailleurs le temps était parfait pour ma collection de nuages, gris et lourds comme mon moral …
Mais bon, il suffisait que je regarde juste les remparts pour me souvenir en fredonnant quelques vers d’une chanson oubliée, ces vers qui m’ont tant aidés quand j’étais loin de ma Provence, c’est bien la première chose que je voyais en descendant de la gare, les remparts.
… le centre du monde,
C’est un pont démoli
….
… c’est une vieille ville
Aux remparts un peu gris
Et où chaque fontaine
Sèche un chagrin depuis.
C’est beau Avignon, je n’ai pas eu le temps de m’y attarder comme d’habitude.
Mais le peu que j’y suis restée, j’en retiendrai au moins une chose … c’est que plus jamais, je ne ferai autre chose que ce que j’ai envie, plus jamais.
Sinon j’ai attendu dans un lieu sublime, de cet hôtel particulier qui ouvre une page à mon imagination où des gens charmants m’ont reçue, avec compétence et gentillesse, et ça n’a pas de prix.
Bon les pigeons sont amoureux et roucoulent aux dernières nouvelles …et moi je crois que je sais où je vais … c’est une matinée que je ne pourrai oublier, une matinée de colère constructive et puis j’ai croisé tant de fontaines …..
J’ai hérité d’anciennes cages, du temps ou les canaris étaient un luxe, ils étaient la seule porte vers le rêve, de cette époque où les gens vivaient simplement, vivaient de peu, travaillaient comme des dingues, et leur petite cage et leur canari étaient leur seul moment d’évasion. C’était un peu à la mode dans les années 50-60, d’avoir perruche et canari dont on accrochait la cage à son volet ou à sa fenêtre pour qu’il puisse voir le ciel.
Je les ai regardé précieusement, comme un souvenir que je n’ai pas eu. Je sais qu’elles sont déjà support à d’improbables rêves.
Les souvenirs d’oiseaux dont je me souviens, sont irréels et sublimes, c’étaient les cousines, on les appelaient les cousines, elles étaient les cousines de mon grand père, elles étaient trois de parfaites et adorables vieilles dames, que Miss Marple auraient pu envier. Col blanc, gilet pastel, châle en crochet d’art et bijoux surrannés, souriant sous l’auréole de leur chignons blancs. Elles vivaient dans un ancien immeuble Hausmannien à Marseille, les Chartreux, je vois encore comme figés dans le temps, les meubles, les tapis, les tableaux, les bibelots d’un autre siècle, les châles de cachemire posés sur les tables comme des nappes oubliées, des poupées et leurs robes, que l’on me prétait pour jouer le temps de la pause café. Mais mon bonheur étaient surtout la visite du dernier étage.
Le dernier étage était un rêve éveillé à mes yeux d’enfant. Le dernier étage était une volière sans cage, les oiseaux y vivaient en liberté au milieu des plantes. Des oiseaux paillaient, chantaient, volaient autour de moi apprivoisés, libres, de la perruche au moineau, du canari au bengali, ils étaient là, soignés et quelquefois relâchés, vivant en parfaite harmonie. Je me souviens du carrelage de terre cuite, tomettes provençales rutilantes et des murs blancs, je me souviens du plafond, poutres et pare-feuilles et des oiseaux perchés sur des perchoirs improvisés. Chaque fenêtre grande ouverte équipée de moustiquaires.
Et dans ma mémoire file, des éclairs de couleurs, ceux des oiseaux qui volètent autour de moi. J’étais si petite, je n’avais pas 10 ans.
Pâques au mois de mars c’est le risque de ramasser les escargots en même temps que les oeufs ….
Elles ont voulu quand même que le cloches passent.
Se cachant dans la maison, pour ne pas savoir où les oeufs tombaient ….
Une fine bruine se déposant sur chaque pétale .. les fleurs timidement osent pointer le bout de leur nez ….
et préparer une jolie table pour commencer les agapes.
Le premier long week end de l’année.
Bon lundi à vous.
Des oeufs de carton, un peu de peinture, un crayon de papier et une touche d’or …. quelques improbables ont vu le jour, hier soir, …. ils sont tombés dans le jardin, c’est normal c’est Pâques.
Il ne faut pas faire de bruit pour les cueillir, sinon ils se réveillent, et quand ils se réveillent, ils posent un regard immense sur ce monde, de ces regards impénétrables, interrogateurs, qui vous font vous sentir tout petit.
Ces regards qui vous font réfléchir à tout, et surtout à la vie.
Ils vous questionnent et là vous ne savez que répondre … comment auriez vous les réponses d’ailleurs, seul sous la pluie dans votre jardin …
Personne n’a la réponse. Alors dans un immense silence, ils vous font comprendre, qu’ils ne sont pas tombés par hasard,
ils sont le symbole de la vie.
Ils sont la naissance du monde.
Ils sont l’origine du tout.
Ils sont l’emblème de l’immortalité
mais comment pouvions nous le savoir, dans notre société où la culture s’étiole un peu plus chaque jour.
Et vous les accueillez dans votre vie, car vous les attendiez depuis toujours.
L’un d’eux est encore endormi, il était si long ce voyage depuis la nuit des temps… Je n’ai pas cousu, je n’ai pas brodé, superstitions de la semaine Sainte, mais rien ne pouvait m’empêcher de prendre un crayon.
Je les aime bien, ils sont énormes … c’était ma façon à moi, de vous souhaiter un bon dimanche de Pâques.
Le ciel est gris, il fait froid, la lumière impossible pour immortaliser le grand saut des oeufs dans le jardin, il est fort possible ….que la chasse à l’oeuf, se transforme en course à l’escargot.
A découvrir ici , la symbolique de l’oeuf
Tous les morceaux se transformèrent en choses bonnes et utiles :
le bas de la coque de l’oeuf forma le firmament sublime,
le dessus de la partie jaune devint le soleil rayonnant,
le dessus de la partie blanche fut au ciel la lune luisante :
tout débris taché de la coque fut une étoile au firmament,
tout morceau foncé de la coque
devint un nuage de l’air le temps avança désormais…
j’adore les mains de ma mère montant l’aïoli, dans le mortier familial en bois d’olivier,
il appartenant à mon arrière grand mère, et il est épuisé de tant d’année de travail.
Morue …
Pois chiches, il faut tellement en manger dans l’année, qu’on ne se souvient plus quand, donc à chaque fois on en colle sur la table …. ;-)
Légumes … et oeufs durs
Aïoli bien sûr …
re Merlusse …
On mange l’aïoli, si on ne fait pas la prière toute la journée, et si on ne jeûne pas …
Ma mère à rajouter des branches de Fortitia sur la table parce que c’était joli, mais ce n’est pas une tradition …
Vous mangez du poisson aujourd’hui ?
Thypoo mon ancien chat, même pas dans tes rêves le chat (il a décidé un jour que la maison de ma mère était meilleure que la mienne)
J’adore les supertistions d’un autre temps ….
Pendant la semaine sainte, on ne faisait pas la lessive, le faire était considéré presque comme un blasphème, et les non croyants eux-même n’osaient pas passer outre cette coutume qui venait on ne sait d’où, sinon on s’attirait les malheurs pour toute l’année. Par contre, on nettoyait la maison de fond en comble :sans doute pour chasser les démons qui s’y étaient installés tout au long de l’année, et là, les femmes avaient de l’ouvrage ; quant aux hommes, la plupart du temps, ils blanchissaient avec de la chaux vive les murs et les plafonds de la cuisine.
Il y avait d’autres interdictions précises :
On ne ramassait pas les petits pois, les fils ne prendraient pas à la rame.
Le vendredi saint, il ne faut pas enterrer les pommes de terre, car la terre saigne, elles pourriraient infailliblement.
Ne pas ouvrir de tombe, la terre est en sang.
Ne pas se faire couper les cheveux car ils ne repousseraient plus.
Ne pas sortir le fumier le vendredi saint, le bétail deviendrait boiteux.
Ne pas coudre, on risquerait de piquer la Vierge.
Ne pas semer de courges, le vendredi saint, elles seraient amères, il vaut mieux attendre le samedi saint lorsque le Gloria sonne.
Les Provençaux entouraient le jour du vendredi saint de nombreuses superstitions :
Les œufs ne se gâtent pas.
Si le vendredi saint tombait au mois de mars, on cisaillait les oreilles des agneaux pour les marquer ce jour là précisément.
Si vous êtes sujet aux migraines, écoutez les Provençaux : pour éviter toute l’année ces migraines, ils recommandaient de se couper une mèche de cheveux, pendant que l’on prêchait la Passion, le vendredi saint.
Il n’y a plus qu’à attendre les cloches :-)
J’ai comme nous tous, arrêté toutes fonctions vitales, incapable de vivre normalement, après la journée du 22 mars, je suis terrifiée par l’horreur du monde, et en même temps, je me dis qu’il ne faut pas qu’on s’y habitue, un attentat ne sera jamais banal, il est le fruit de la terreur et de la folie. Je ne sais comment expliquer tout ça à mes enfants, je ne sais comment leur dire que ce n’est pas normal. Les Etats parlent de guerre, mais une guerre c’est quand on peut riposter et se défendre, là que doit on faire ? Je n’ai aucune réponse, aucune idée, je ne suis qu’une brodeuse, une brodeuse qui s’enfuit dans ses fils et ses trésors infimes d’un autre temps, pour survivre à l’innommable.
La demoiselle est arrivée de Belgique, la semaine dernière, a-t-elle vécu dangereusement, a-t-elle pris un avion ?
Cadeau d’une amie belge, cadeau sans prix, cadeau immense, pour la dingue de poupées et de broderie que je suis.
Elle attend depuis des années, bien avant que mur de Berlin ne s’effondre (made in GDR) qu’une petite fille ose lui broder son trousseau, il y a tout ce qu’il faut, son hochet, son bonnet, son burnous.
Des mots désuets que j’aime écrire, burnous, hochet, trousseau …
Elle est belge ma petite fille, et je voudrais que toutes les petites filles n’aient qu’un seul souci,
broder le trousseau de leur poupée.
Alors j’ai envie de recréer une jolie boite comme ça, avec le trousseau d’une poupée à broder, et une poupée minuscule, à serrer fort contre son coeur, quand tout s’écroule autour de nous.
Vous pouvez me prendre l’idée, vous pouvez, je le ferai quand même, ce n’est pas moi qui l’ai eu, mais un fabricant d’un autre temps, du temps où les petites filles n’avaient pas peur de prendre le métro.
Merci à toi mon amie belge, merci, tu me connais bien. Elle est aimée, elle est choyée, elle est en sécurité. Elle est mon trésor.
Merci Chantal.
“Il se commet de grands crimes dans le monde ; mais peut-être le plus grand est-il de tuer l’amour.”
Boleslaw Prus / La poupée