J’ai dix ans, elle arrive dans son globe de plastique, mon père voyage toute la semaine, il a un métier sérieux, il est inspecteur, il inspecte les gens et ça m’impressionne autant que l’inspecteur de l’école, elle est belle, elle est toute habillée de blanc, elle est une mariée de Provence, mon père ce provençal pur huile d’olive me la ramène pour mon anniversaire (ma fille dès que tu ne vois plus d’oliviers, tu entres dans le pays des sauvages), il devait avoir fait une escale sur Arles et Nîmes, son royaume.
Elle avait sur elle, presque 45 ans de crasse, je lui devais bien une grande toilette, car elle a fait bien plus que ça dans ma vie … elle m’a faite m’intéresser aux costumes de notre Provence, aux coutumes et aux us dans lesquels j’ai été bercée toute ma vie.
Alors, je vous en prie, ne méprisez jamais le pouvoir des poupées folkloriques sur les petites filles … elles sont de 4 sous peut être, elles ne sont que folklore, mais elles sont magiques.
Les vêtements ont trempouillés deux ou trois jours, avec changement d’eau très souvent, toutes sortes de lessives et de détachants. Séchage au Mistral, et repassage.
La voici toute resplendissante avec la coiffe encore un peu sale, je n’ai pas osé la défaire. Je sais bien que les puristes, crieront au crime de lèse majesté, son costume n’est pas parfait, mais qu’importe, elle est celle qui a engendré des années de bonheur.
et comme une passion n’est jamais solitaire, je lui ai trouvée une amie, moins jeune qu’elle. Je suis sûre qu’elles se racontent des secrets d’Arlésiennes, je vais essayer de les entendre chuchoter.