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J’ai eu 60 ans
Mon dieu que c’est difficile à écrire. 60 ans, j’ai 60 ans, 60 ans, c’était pour moi la fin d’un tout quand j’en avais 20, et je n’en suis toujours qu’au commencement. Je suis heureuse de les avoir ces 60 ans, d’abord parce qu’en 10 ans, je n’ai pas eu le temps de m’habituer à en avoir 50. J’ai 60 ans et c’est comme si j’avais enfin rayé la cinquantaine et j’en suis heureuse, ces dix dernières années ont été embuches sur embuches, épreuves sur épreuves, chagrins sur chagrins, épreuves sur épreuves, certains autour de moi n’ont pas le privilège de les fêter, alors honnêtement, je tourne la page, bien sûr tout ne sera pas rose, mais je tourne la page d’une décennie qui ne m’a pas vraiment aimée.
J’ai écris ça le 20 avril, et puis je n’ai pas publié. Je n’ai pas publié parce que c’était bien trop triste de se morfondre sur un chiffre. J’ai fêté les 50 ans d’une amie, quasiment le lendemain et c’était tellement fantastique malgré les soucis et les peines que je me suis dit que je n’avais pas à me plaindre.
Je vais essayer jusqu’au 20 avril 2024, d’écrire beaucoup plus souvent que ces derniers temps. Il y a quelques jours, je vagabondais sur ce blog, et je me suis aperçue qu’il était vraiment mon support à souvenirs, de doux moments de sourire et de douceur et j’aime ça la douceur, j’aime sa sérénité. Je déteste les gens qui se prennent au sérieux avec une prétention extrême, sûrs d’eux et sans personnalité, je ne les aime pas. Se prendre au sérieux c’est croire que l’on est immortel, la vie se charge quelquefois de vous rendre humble hélas. Alors je vais continuer mon petit bout de chemin de Kratrice Rurale dans ma fabrique à songes, je vais continuer à faire naître des improbables et à m’émerveiller sur un rien. Je vais rester moi même, sans avoir besoin de vous vendre quoi que ce soit, parce que vous le savez je n’aime pas vendre et surtout pas moi.
Mon jardin renaît peu à peu, c’est important un jardin, aussi important qu’une bibliothèque et un atelier, et j’ai le tout. Le bassin renaît également, les grenouilles, les libellules reviennent tranquillement.
Alors tout doucement et juste en désordre, un pèle-mêle des photos de ce mois d’avril …
Prendre le temps de regarder les abeilles
Respirer la glycine, plantée l’année dernière
Regarder le nid de hobbit qui est maintenant incontournable du jardin
L’oranger a fleuri
Ce sera une année à Monnaie du Pape
L’arbre de Judée
Mon gâteau tout vert
Des arc en ciels en ribambelle
Du Lilas à foison
Des poissons qui se réveillent
Il y a eu des naissances l’été dernier que je n’avais pas vu pour cause de canapé
Poissons sous haute surveillance
La première rose
Prue, Phoebe et Piper se dorent au soleil
La seule demoiselle chat et les dames de 11h00
Et puis j’ai un peu brodé, un peu bricolé et un peu cousu.
Une robe pour une Mercredi Addams qui est bien sexy en sous vêtements
J’ai trié mes graines pour le jardin et j’ai brodé de belles boites, une pour les fleurs, l’autre pour le potager
J’ai même retrouvé des graines de baobab
et puis des naissances et c’est toujours magique
Et des cafés, des cookies et des petits moments de bonheur
Parce que finalement, mes petits riens, car ce sont les miens, c’est tout simplement ça.
On se donne rendez vous pour une année de petits riens ?
ps : gâteau et cookies 🍪 cuisinés par Pauline.
I’m a Barbie Girls … Non je suis Solariane
Il était une fois une poupée de 4 sous (5 francs pour être précis) vendue sur le catalogue de laines des 3 suisses. C’était hier en 1968. J’avais 5 ans. Je te laisse faire le calcul.
Elle était le clone d’une poupée américaine fort chère et concurrente de Barbie, je ne sais même pas si elle était vendue en France, Tammy. Tammy et Solariane (du nom d’une laine des 3 suisses, appelé Pagine en Allemagne pour un catalogue de laine également) représentaient la girl next door. La jeune fille d’à côté si tu préfères qui désigne une jeune femme jolie mais à la féminité modeste et peu agressive. Le contraire de Barbie, qui les seins en obus et la chevelure oxygénée ne laissait aucun doute pour l’époque sur ses intentions sexuelles.
Ma mère n’a jamais aimé Barbie, femme d’une génération qui brulait son soutien gorge, elle qui avait passé son permis en 1962. la liberté de la femme commençait par la fin de la femme objet, alors Barbie n’entra jamais à la maison J’ai donc eu ma Solariane, et j’ai appris à lui coudre et à lui tricoter des vêtements (les 3 suisses vendaient de la laine). Mignonne, elle avait une multitude de couleurs de cheveux différentes. Elle était vendue dans un sachet plastique, en tenue de sport avec des baskets, loin du body au décolleté plongeant de Barbie.
Je te présente donc mes Solariane, pour lesquelles j’ai ressorti une laine d’époque et des 3 suisses, et je peux te dire que j’étais plus douée quand j’étais gamine. Dur de tricoter une laine aussi fine.
J’ai réfléchi longuement au fait de ne pas avoir eu de Barbie ou beaucoup plus tard. Je regardais les « influenceuses » de 25 à 40 ans sur Instagram, en m’interrogeant non sur elles, c’est le métier, mais leurs followers. J’ai l’impression qu’ils continuent à jouer à la poupée avec la personne qu’ils suivent. On a droit à la panoplie complète de vêtements et accessoires, une garde robe effrayante par le nombre et le prix de chaque chose, puis les loisirs, parce que Barbie, il faut l’avouer, elle a mis un temps certain à devenir cosmonaute et pilote d’avion, ce n’était que du loisir, Barbie se maquille, Barbie fait de la danse classique, Barbie pique nique sur la plage, Barbie part en camping-car. Barbie promène son chien, Barbie et sa petit soeur, Barbie fait la cuisine, Barbie au ski et au tennis, Barbie chez le coiffeur, Barbie et Ken vont en suprise partie, Barbie fait du shopping. Les followers se projettent sur les « influenceuses » comme une petite fille se projette en jouant à la Barbie, comme elles se sont projetées enfant en jouant dans ce monde rose et aseptisé de la compagnie Mattel, parce que Solariane a disparue rapidement pour être remplacée par des poupées mannequins toutes plus femme-objet les unes que les autres.
Alors ma question est, comment peut on prôner une égalité des femmes en étant soi même une femme objet. Parce que Gamine, il faut qu’on te le dise, on ne t’a pas attendu. Le chemin on te l’a défriché et bien même, à coup de machette, à coup de pied, à coup de gueulante et pas à coup de jolis dessins et de #, ( je ne te parle pas de #metoo, je l’ai utilisé moi aussi, je suis si heureuse que ce pourri ait pris perpète). Nous sommes de la génération qui a lu le manifeste des 343 « salopes », qui a vu l’avènement des planning familiaux, la légalisation de la pilule et de l’avortement, celle qui a vu les grandes écoles enfin ouvertes aux femmes. Tu veux que je te dise, c’est en 1992 ou 1993 que les femmes ont eu l’autorisation de porter un pantalon dans la marine nationale, tu vois ce n’est pas si vieux. Tu imagines que ça s’est fait tout seul, sans combattre, sans lutter à notre niveau pour faire notre place ? Pour nous qui nous sentons aujourd’hui l’égale de l’homme, la parité est une négation des compétences. Je le crie haut et fort, on doit combattre à armes égales dans le difficile milieu professionnel, cerveau contre cerveau. On a élevé nos enfants sans manquer un jour pour enfant malade, on a fait nos nuits de garde et sujetions sans que personne ne sache que nous étions mère de famille, on a rempli nos missions avec une p…. d’endométriose à se flinguer. On n’a jamais parlé de nos soucis personnels à qui se soit. Mais on a survécu. On a mis des baffes et des claques aux gars qui nous manquaient de respect. En un mot on s’est faite respecter. On s’est battu 40 ans, chaque seconde de notre vie, pour que toi, tu nous expliques que tu es une femme, et que grâce à toi, on peut se promener les poils sous les bras et sur les jambes. Merci on le savait déjà, d’un choix personnel tu en fais une tendance. Et la sororité on s’en bat les ovaires. Parce qu’une fois que tu n’as vécu qu’avec des hommes, tu as d’autres valeurs et d’autres priorités que de faire la femme objet avec tes copines sur les réseaux sociaux.
Tout ça pour en revenir à Solariane, la poupée qui nous a permis de ne pas devenir un produit marchand sur la grande toile. Alors merci à toi Solariane, que j’ai sorti de son vanity case d’époque, et que j’ai un peu pomponnée, parce que le féminisme ce n’est pas non plus la négation de la féminité qu’on se le dise.
Tu ne pouvais par rater l’info
J’espère que tu es au courant, lecteur, parce qu’il a neigé sur le Luberon cette nuit, et sur toute la Provence, enfin une bonne partie. 14°C le midi et la nuit la neige. Tu pique-niques au bord de la mer, tu fais 25 km pour rentrer chez toi et tu es sous la neige. Je te rassures à mon grand soulagement, ça n’a pas tenu et je n’étais pas à la mer, mais bel et bien dans mon jardin. Quoiqu’il semblerait à l’heure où je t’écris, que ce n’est pas sûr qu’il n’y ai pas une petit épisode flocons cette nuit.
J’ai une pensée émue pour la dame de Facebook qui a ricané quand la neige a été annoncée. Avec 12°C sur Marseille, vous imaginez qu’il va neiger ? Assena-t-elle du haut de sa suffisance de non provençale. Marseille n’étant pas la Provence toute entière, comme Paris n’est pas la France, il a neigé tout autour, du Var à la Camargue en passant par le Vaucluse et le Luberon. Et de mémoire de provençal on se souvient des années 80 où bloqués 6h00 sous la neige dans la voiture en tenue printanière, car l’autoroute était impraticable. On se souvient également de 15 jours bloqués par les neiges et cernés par les loups, priant pour que les lignes électriques tiennent. On se souvient des minots en train de dévaler depuis la Bonne Mère en ski et luges. Alors quand la météo te dit attention la neige, ben tu anticipes, même si tu es en train de prendre un bain de mer aux Goudes.
J’ai horreur de la neige, c’est comme si tout d’un coup tout s’arrêtait. Les oiseaux se taisent, surpris par le froid, les juments ne sont pas fanatiques non plus, mais où est l’herbe ? Les chiens se mettent sur la terrasse et re-entrent dans la maison, pensant pouvoir se retenir, et ce n’est hélas pas toujours le cas. Les chats sortent par une porte, ré-entrent et demande à sortir par une autre porte au cas où la neige aurait fondue dans les 30 secondes. Tout ça pour te dire que c’est super chouette sur les photos, mais dans la réalité je ne me sens pas l’âme nordique, ni de celle du Commandant Charcot sur le Pourquoi-pas ?
Aujourd’hui pas de sortie prévues, donc rester au chaud devant la cheminée avec un chocolat chaud a été l’alternative la plus sécurisante. Je suis quand même allé prendre des photos, comme tout le monde sur les réseaux sociaux, parce que la neige, c’est joli à prendre en photo, les pieds gelés, les mitaines aux mains pour appuyer sur l’obturateur, une béquille à la main, l’appareil de l’autre, mitraillé mon jardin. Tu veux les voir ?
Allez je te les montre, parce que c’est quand même rare comme situation. Les oliviers, le tamaris, le mimosa sous la neige, ça craint. La folle de première fleur du forsythia qui a choisi aujourd’hui pour fleurir. Les tourterelles s’amusaient à faire tomber la neige des fils électriques et des fils de clôtures et attendaient que j’ouvre le poulailler pour partager la paté des poules.
Maintenant la pluie, il nous faut de la pluie. Ca serait chouette non ?
Bon début de semaine à tous, et peut être à demain.
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Un dimanche ordinaire en Provence
Les fleurs de la Saint Valentin, tiennent encore bien la route. La matinée semble d’une grande sérénité, on hésite même à déjeuner dehors, mamy a fait une blanquette. Une grosse flemme nous prends, nettoyer les chaises de jardin et la toile cirée sous la treille, on reste dans la maison. Ils annoncent de la neige pour ce soir. Tout le monde se marre, de la neige, de la neige, il fait 14 degrés. Je vois sur les réseaux sociaux, les gens hilares, je ne dis rien, notre région est imprévisible comme ses habitants. Enfin on verra bien, on se prépare, on ne sait jamais.
Les fleurs du jardin commencent à poindre tout doucement le bout de leur nez. Je débordélise mon atelier, je trouve des tonnes d’objets, de livres, de tissus et de dentelles, il me faudra deux autres vies pour tout utiliser. Mais sait-on jamais ? Ca peut servir. Mon mari plaisante, en me proposant la remorque devant l’atelier pour que j’en jette une bonne partie, je ne peux pas, c’est impossible, je me marre en lui expliquant que sur Instagram, pour un millième de ce que j’ai, les gens font des photos. Mon atelier ressemble à l’annexe d’un brocanteur. Je pense très sincèrement en faire commerce. J’ai retrouvé, un tableau en verre inversé chinois, une aquarelle d’un peintre excessivement connu. J’ai retrouvé quelques cartons de dentelles divines, et des soies anciennes qui seront bienvenues pour rhabiller les poupées. L’intégrale d’Agatha Christie cherche une place, un bonheur à relire. Il me faut trois vies finalement.
Je vous montrerai peut être tout ça quand ca sera praticable, je n’aime pas trop montrer, étaler … surtout que le trois quart du temps je ne fais rien avec, juste le plaisir et le bonheur de les avoir sauvés. Ils me racontent des histoires, il y a de l’affectif entre eux et moi, et je pense au vers de Lamartine qui ont enchanté nos cahiers de récitations.
Milly ou la terre natale
Pourquoi le prononcer ce nom de la patrie ?
Dans son brillant exil mon coeur en a frémi ;
Il résonne de loin dans mon âme attendrie,
Comme les pas connus ou la voix d’un ami.
Montagnes que voilait le brouillard de l’automne,
Vallons que tapissait le givre du matin,
Saules dont l’émondeur effeuillait la couronne,
Vieilles tours que le soir dorait dans le lointain,
Murs noircis par les ans, coteaux, sentier rapide,
Fontaine où les pasteurs accroupis tour à tour
Attendaient goutte à goutte une eau rare et limpide,
Et, leur urne à la main, s’entretenaient du jour,
Chaumière où du foyer étincelait la flamme,
Toit que le pèlerin aimait à voir fumer,
Objets inanimés, avez-vous donc une âme
Qui s’attache à notre âme et la force d’aimer ?…
J’ai cuisiné pour les oiseaux du ciel, de la végétaline et des graines, ça n’a pas l’air de leur plaire, on verra bien, peut être avec le froid qui revient. Mes jardins de mousses se complaisent, saviez vous que pour les japonais, les mousses sont sacrées. Le rouge gorge insaisisable en photo, trille dans le rosier de banks, peut être s’approchera-t-il de mes mixtures.
Il est 17h00, le ciel est blanc, la neige fondue commence à tomber, neigera, neigera-t-il pas ? Le paradoxe de nos hivers. Je sais que demain il y aura Mistral, ma cheville me fait encore plus mal que d’habitude, c’est mon baromètre. Nous sommes devenus au fil du temps, les rois des boudins de porte chez nous, car il s’infiltre de partout. Un peu moins maintenant que la maison est bien isolée, mais bon c’est quand même quelque chose le Mistral. J’ai cueilli quelques violettes et deux brins de mimosa, je ne suis pas sûre que tout survivra à la neige, juste pour en profiter un peu, demain promis je vous fais des photos. Ca y est de gros flocons tombent pendant que je vous écris, j’ai fait une photo. Je n’aime pas la neige.
Les sans grades
J’ai une immense tendresse pour les poupées anciennes et vous le savez tous. Les poupées anciennes, les belles de porcelaine, celles aux dents éclatantes et aux grands yeux en émail. Celles dont les perruques étaient de véritables cheveux humains, les nattes vendues par les femmes quand elles n’avaient plus de quoi manger, ces poupées là font rêver, moi la première, poupées pour petites filles riches, très riches même, qui valaient quelquefois le salaire annuel d’un ouvrier, d’un journalier. Je les aime, et j’en ai. Mais j’ai un immense amour, pour les sans grades, celles qui n’ont rien de passionnant pour un collectionneur, celles dont les mamans des petites filles qui n’étaient pas très riches achetaient les têtes en cartons et les mains en celluloïd à la droguerie – mercerie, au bazar du coin de la rue, le magasin de frivolités ou les commandaient par correspondance sur l’hebdomadaire féminin qui offrait le patron et les modèles de vêtements. Mais bien souvent, même le journal féminin était bien trop cher, la lecture était un luxe. Alors c’était de l’improvisation, des gestes ancestraux qui ont créées ces poupées. Ces poupées là bien souvent avaient le corps et les membres cousus par les mamans, et avec l’aide de leur petite fille un magnifique trousseau digne des plus jolies princesses, naissaient à quatre mains avec des restes de laine et des tombées de tissu, ou des estrasses (chiffons) comme on dit chez moi. Leurs cheveux étaient de laine, de fil ou de filasse, quelquefois ce n’était qu’une demie tête qu’on apposait sur une poupée de chiffon.
J’en ai une à laquelle je tiens particulièrement, c’est celle de la maman d’un ami. Son petit fils me l’a offerte car borgne elle lui faisait peur. je l’ai déshabillée doucement, la robe de soie a fusé dans tous les sens, et je lui ai commandé une paire d’oeil d’un magnifique bleu. Dès qu’ils arrivent par voie postale et de France, je vous ferais part de sa renaissance. Elle est bourrée de paille comme presque toutes les autres. Le textile valait très cher, et la bourre de laine pour les coussins étaient du luxe.
J’ai des têtes non montées offertes par une amie également, j’imagine des mamans qui comme moi, ne les ont jamais montées, peut être trop occupée pour les créer ou tout simplement venant de vieux stocks de magasins.
Elles sont là, elles attendent un jour mon bon vouloir, j’ai amassé la documentation les concernant. Je viens de faire un recollement de tout ça et les ranger au même endroit, dans mes amoncellements digne d’un inventaire de Prévert, il y en avait un peu partout, je sais que j’en ai d’autres dans d’autres cartons, lutines d’un autre temps, poupées aimées, poupées usées. Elles sont de celles qui racontent la petite histoire, celle des restrictions, des guerres et des après guerres, cette histoire que personne ne raconte, celle du quotidien de ceux qui ont souffert. Celles du temps d’avant la surconsommation, celles d’un temps que même moi je ne peux comprendre. Celle d’un temps où les poupées étaient tant aimées.
Bonne Saint Valentin à tous.
j’ai préféré vous parler de poupées, des coeurs vous devez en être en overdose.
Tant qu’il y aura des violettes.
Les premières violettes ont pointé le bout de leur nez depuis plusieurs semaines déjà, j’ai pris le temps de faire un bouquet. Les bouquets de violettes ont pour moi, un symbole particulier. Il y a toujours eu des violettes dans le jardin, des violettes sauvages. Ma grand mère dans le milieu des années 70 m’avait offert un vase à violettes, minuscule vase pour poupées qui m’avait ravie. Je crois que les violettes étaient pour elle, dame élevée avec une importante éducation 19ème, d’un romantisme fou. C’était une grande rêveuse ma grand mère et une grande lectrice, j’ai lu à ses côtés les Jalna, les Pardaillan et les gens de Mogardor, je crois que si elle avait eu une autre vie, elle aurait été romancière ou poétesse.
J’ai continué bien après son départ à collectionner les vases à violettes et à lire (il y en a dans tous les placards). Elle m’avait appris à faire un bouquet, à disposer les feuilles autour et à lier le tout avec du fil à broder (bien évidemment). Donc chaque année, je fais un bouquet et je pense à elle. Je dépose mon bouquet dans un des vases, je le dessine, je le brode ou je le photographie.
Dans mes trésors de chine également, j’ai amassé de petites porcelaines sans prétention, coquetiers et autres verres à liqueur, souvenir d’un autre temps, du temps où Toulouse était la ville aux violettes, du temps où les boutiques à souvenirs regorgeaient de trésors fabriqués en France, leur charme est suranné presque kitch.
Je glisserai une violette dans un de mes livres, elle séchera dans un parfum désuet, souvenir d’antan qui s’en échappera, si un jour quelqu’un le feuillette. Cette violette si douce qui dans le langage des fleurs signifie la pudeur, la modestie et l’amour secret m’amène à ses vertus médicinales.
Incorrigible romantique, je suis la petite fille de celles qui ont tant rêvé dans un temps où de nombreuses guerres ont ravagé leur vie. Et j’aime à imaginer que tant qu’il y aura des violettes, on pourra prendre le temps de rêver.
Les coquetiers ont servi hier soir pour un repas d’oeufs à la coque très très frais. Les poulasses (vu leur popotin qui ressemblent à la porte d’Aix, je ne me risque pas à les appeler les poulettes, elles seraient terriblement vexées) ont repris leur rythme de croisière pour la ponte, les jours rallongent.
L’arbre de jade et c’est si rare a fleuri. Et bientôt les camélias, fleurs préférées de Mademoiselle Chanel, encore une grande dame, d’une époque disparue à jamais.
Je suis un brin nostalgique ce matin, il fait très froid, le ciel est d’un bleu saisissant. J’aime ces dimanches un peu au ralenti où le monde autour de nous n’existe plus.
Je file en cuisine, faire honneur à mon autre grand mère pour son traditionnel plat dominical.
Bon dimanche.
La chevrière a sorti ses chèvres
Les chèvres sont à la pâture, elles attendent des bébés. C’est trop beau les bébés chèvres.
Ce qu’il faut savoir et que bon nombre de touristes ne savent pas. Si tu veux du fromage de chèvre frais, il n’y en aura pas de décembre à mars, la production reprends au sevrage des chevraux.
Quand tu manges du fromage de chèvre à Noël, il est affiné et c’est du vieux fromage. Nous n’en achetons pas durant cette période de l’année.
Sur ces pensées totalement incongrues de bon matin, parce que hier nous avons croisé les chèvres, je me dis que le printemps est bientôt là. Dans le Var je sais que tous les amandiers sont en fleurs.
J’ai hâte ce printemps qui me semble si lointain. Les chats comme à leur habitude m’accompagnent au jardin. Le mimosa est magnifique. Je n’ai toujours pas fait de bouquet, je le préfère dans le jardin.
et puis une excellente nouvelle, les nouvelles mangeoires à oiseaux plaisent aux mésanges. C’est mon mari qui va être heureux. Et s’il y a des mésanges, il y a les chats bien sûr.
Je ne sais pas si en me lisant, vous vous en apercevez j’ai du mal à rassembler mes idées, à écrire. Un peu comme si c’était rouillé au fond de moi.
Pourtant il fait un temps magnifique, froid mais magnifique, je devrais être inspirée.
Je suppose que j’ai eu besoin de mon énergie pour faire autre chose. On se donne rendez vous peut être demain ? Si vous le voulez bien.
Dans ma maison
En novembre 2010, j’écrivais ceci :
Novembre 2010,
Ce matin j’avais envie de vous parler de ma maison. Il y a des maisons étranges, des maisons qui semblent douées d’une vie propre, des maisons qui sont vivantes, la mienne enfin ce n’est pas la mienne mais j’y habite, est comme on pourrait dire « une maison de famille » mais sans le pompeux du terme et elle est l’une des ces maisons. Ma maison n’a pas de nom, elle n’a pas de numéro dans sa rue, elle fait face à une colline sacrée et elle est là immuable depuis le 14ème siècle et en elle vit l’atmosphère de toutes les vies qui s’y sont croisées, des destins qui ont empreints ses murs de mémoire.
Je l’ai ouverte un matin de février, il y a bientôt 10 ans de celà, toute mon enfance, j’étais passée devant, admirant la végétation qui la cachait du regard des autres, inventant une vie à ses habitants. Elle avait été squattée, abimée, mal aimée pendant quelques temps, et moi je suis tombée amoureuse d’elle. Dès que j’ai entrouvert la porte de la cour, j’ai su, je n’ai rien vu d’autre, elle venait de m’adopter, qu’importe le chauffe-eau en panne, le chauffage approximatif, la salle de bain précaire, le carrelage à refaire, la gatouillo minuscule, dans ma maison, c’est Halloween toute l’année, les araignées filent et refilent le parfait amour entre elle, se reproduisant à une cadence infernale, les chauves souris « les pipistrelles », s’engueulent joyeusement les nuits d’été, crevant de leurs cris stridents le silence étoilé à la lueur de la lune et du réverbère. De doux fantômes se promènent les nuits d’hiver, et dans un demi sommeil je leur demande de bien vouloir ne pas réveiller mes filles quand ils regagnent le grenier et de bien vouloir retirer leur chaussures pour gravir l’echelle de meunier, ils chuchottent et croient ne pas faire de bruit, mais je les entends, j’entends la dame couturière qui peste parce qu’elle a perdu son dé, la grand mère d’Elise qui frotte ses mains sur son tablier, et interdit aux enfants de jouer à la corde à sauter sur la terrasse de peur qu’elle ne s’effrondre, j’entends mon grand père Jean saluer monsieur P. qui bricole à son établi et je repète inlassablement les gestes du passé, sans m’en apercevoir, et mes filles jouent aux taraïettes sur les premières marches de l’escalier comme de nombreuses petites filles avant elles. Elle est remplie de souvenirs qui deviennent les miens au fil des jours, elle est remplie de gros chagrins ephémères et de rires en cascades de petites filles, de goûters copieux, de chansons et de fous rires, et surtout de beaucoup d’amour. Il y vit des chats somnolents, un chien trop gentil, des poissons rouges aux noms d’intellectuels, quelquefois des phasmes, des rouges gorges, des hérissons, des tétards et autres bestioles des campagnes réfugiés quelques heures, soignés, nourris et relachés. Ma maison sent bon le gateau, les confitures, la sauce tomate et l’aioli, ma maison sent le basilic et la menthe qui poussent sur les fenêtres, et quelquefois il faut le dire, le pipi de chat, ceux qui ont élus domicile à l’ombre de la terrasse, se prélassant d’un seul oeil guettant le lezard de passage, la sauterelle imprudente. Les grillons et les crapauds s’égosillent si fort la nuit, que je suis obligée d’augmenter le son de la télévision pour écouter mon programme ou de l’éteindre pour pouvoir profiter de leur concert, les rossignols racontent le matin très tôt à qui veut bien l’entendre leurs rêves de la nuit. Les escargots domestiques, à la carapace orné de vernis à ongle afin de les reconnaitre et qui portent chacun un nom de baptème, se perdent très souvent et les cris fusent « Mamaaannnnnnnn tu n’as pas vu Lulu mon escargot, je ne le trouve plus ! » et les scarabées verts qui entrent à chaque fois pour apporter de bonnes nouvelles. Et puis le rosier qui chaque année essaye de nous rendre la vie plus belle, parce que la première rose de l’année est signe que le beau temps et les abeilles vont arriver. Quelquefois ma maison se pare de milles lumières, et une multitudes de bougies éclairent tout en dansant, les marches de l’escalier, pour fêter Noël ou un anniversaire, où tout simplement pour le plaisir d’une soirée ensemble. Dans le silence, je l’écoute respirer, vivre, elle est le coeur de ma famille, Elle Est et c’est tout.
Ma maison est ouverte à tout ceux qui veulent bien y dormir et prendre leur petit déjeuner sur la terrasse, ou goûter la recette des boulettes dominicales de ma grand mère, la soupe au pistou de ma mère, ou les supions à la sétoise de tata Pierrette. A l’ombre du monte en l’air, les recettes se transmettent un peu plus chaque dimanche, mais ce n’est pas moi qui décide, non non je ne décide jamais rien.
J’invite et …. c’est elle qui choisit ses hôtes, elle décide si ses visiteurs ont gardé le coeur pur de l’enfance, mes vraies amis aiment ma maison, ils la bichonnent et elle le leur rend bien, ils s’y sentent bien, et n’ont plus envie de partir, les autres …. la maison se charge de les faire fuir. Elle se transforme, et se rend répulsive dès qu’ils la regardent, et ils ne voient plus qu’un tas de ruine, une maison délabrée, et pas toujours trop bien entretenue. Et c’est ce qui fait la force de ma maison c’est qu’elle sait qui est bon et qui ne l’est pas.
Le jour où je la quitterais, je sais hélas que ce jour viendra, je voudrais que ce soit quelqu’un qui l’aime autant que moi qui l’habite mais je sais que mon souhait sera exhaucé c’est Elle qui le choisira.
En attendant ce jour triste, j’économise mes forces et des petits sous pour lui faire un beauté, j’ai déjà hâte le printemps, que les fenêtres s’ouvrent, que l’air pur entre, que les rideaux blancs s’envolent dans la lumière et que la première cigale sorte de terre. C’est ma maison, elle ne se trompe jamais, elle est mon refuge, mon jardin secret, elle soigne les blessures et tant pis pour ceux qui n’ont pas su l’apprécier, la porte était ouverte …
Janvier 2023,
J’ai déménagé 5 fois depuis, aujourd’hui en 2023, je suis vraiment dans la mienne de maison, ou presque, car elle n’est pas vraiment terminée, pas encore, mais ce jour viendra.
Je me suis aperçue, que c’était moi qui rendait les maisons ainsi. J’espère de tout coeur que mes filles feront la même chose, le jour où je ne serai plus là. Mais ce jour n’est pas encore là. Aujourd’hui il y a grève, et les grèves … j’ai toujours adoré, d’abord parce que je suis presque toujours solidaire, mais surtout parce que mes filles sont à la maison, pas de cours à la fac aujourd’hui. Et ce n’est que du bonheur. Depuis qu’elles sont petites ça a été un déchirement pour moi de les voir reprendre l’école. Nos meilleures années ont été lorsque qu’elles faisaient l’école à la maison au Moyen Orient. Bien sûr elles ont leur vie, et je ne les empêche pas de vivre, mais c’est un bonheur de les savoir avec moi.
Dans ma maison, il y a toujours des fantômes mais ce sont les miens. Ils sont là présents, ceux de ma famille qui s’y sont éteints. Dans ma maison, rien n’a changé, les gâteaux, les animaux, les marches d’escalier, les pipistrelles et maintenant les poules et les tourterelles. Dans ma maison, les jours s’écoulent et c’est elle qui est mon refuge. Oh ce n’est pas tous les jours facile, il y a des jours où il fait froid, où le feu ne veut pas prendre dans la cheminée. Qu’il fait si froid dans mon atelier, que je ne peux y aller. Il y a des jours où le moral n’est pas au beau fixe. Il y a des jours où je rêve de courir, de gravir les pentes de la colline, d’arracher les herbes dans le jardin, et je peux toujours pas. Il y a des jours où j’ai envie sur un coup de tête d’embarquer mes filles pour manger des pizzas en Italie, mais je ne peux pas conduire longtemps.
Mais un jour viendra où tout redeviendra normal , car il y a des jours où tout devient magique, parce que les étourneaux survolent le jardin. Et que les poules ont fait des oeufs pour des patisseries étonnantes.
Demain je vous raconterai comment ce n’est jamais facile pour Monsieur, de décharger une remorque de foin. Bonne journée.